Un résumé des différents chapitres du livre "tirer bénéfice du don : pour soi, pour la société, pour l'économie" FYP editions 2013.

1 Le don ? Quelle idée !

Le don est répandu dans la société : bénévolat, don aux œuvres, don du sang mais aussi de plus en plus dons entre particuliers. La monnaie a permis de développer l’échange à l’échelle de la planète. Le groupe innovation monétaire s’est demandé si un autre outil, que l’on pourrait appeler « la donnaie », pourrait lui faciliter le développement du don.

2 Donner, une capacité naturelle mais limitée

Le don, tout comme l’échange sont des capacités naturelles de l’homme. Mais la confiance qui permet de créer des alliances nécessite d’avoir une vue d’ensemble des différents liens dans le groupe (une vision holoptique).
 
Ainsi le don et l’échange naturel sont limités probablement aux environs d’une douzaine de personnes pour des raisons cognitives (le nombre de Dunbar). 
 
Il est possible de dépasser nos limitations cognitives à l’aide d’outils. C’est le cas de la monnaie qui nous permet d’échanger avec un grand nombre de personnes. Pourrait-on disposer d’un tel mécanisme pour faciliter le don dans les grands groupes ?

3 De quel don parle-t-on ?

Nous pouvons distinguer différents types de dons.
  • Les dons avec réciprocité (dons agonistiques ou dons cérémoniels) : ils ont pour but de faciliter les alliances, ils créent une dette et une attente de réciprocité ;
    • Les dons libres que l’on choisit de faire pour développer une alliance ;
      • Le don-échange : le fait que le contre-don soit remis à plus tard nécessite d’accepter le risque de ne pas avoir une réciprocité et ainsi montre sa confiance en l’autre (pour faciliter les alliances entre deux personnes ou deux groupes) ;
      • Le don pour reconnaissance : le retour ne vient pas forcément du bénéficiaire du don mais d’autres membres du groupe (pour faciliter la coopération dans un groupe grâce au mécanisme d’estime) ;
    • L’obligation de don qui résulte d’une dette ;
      • Le don contraint : il est obligatoire pour rester dans l’alliance. Le fait d’appartenir à une famille ou un village crée une obligation sociale ;
      • La figure chrétienne du don résulte d’une dette irremboursable –le pêché originel- ce qui pousse à donner toujours plus mais mène également à la culpabilité
  • Le don sans réciprocité 
    • Le don naturel : dans une petite alliance, nous pouvons donner naturellement sans rien attendre en retour. Une vision holoptique des relations entre chacun nous donne un sentiment de sécurité dans le groupe ;
    • Le don désintéressé (sans intéressement envers autrui ou le groupe) : la motivation est intrinsèque – estime de soi ou réalisation de soi ;
      • Le don gracieux : il vise à rendre l’autre heureux ;
      • Le don solidaire : il vise à aider l’autre ou le secourir ;
    • Le don gratuit (sans intérêt envers les autres ou le groupe, ni même envers nous même) : il est considéré comme non viable par la majorité des auteurs ;
Dans la suite de l’ouvrage, nous chercherons à savoir si nous pouvons faciliter le don désintéressé qui nous autoriserait des alliances plus grandes que celles que nos capacités cognitives nous permettent sans nécessiter de réciprocité. Nous chercherons également à découvrir s’il est possible avec un tel mécanisme de facilitation du don de faire mieux que l’échange dans certains domaines ou ce dernier utilise également un mécanisme de facilitation tel que la monnaie.

4 l’inconvénient du don et celui de l’échange

Il y a plus de chance de satisfaire un besoin par l’échange que par le don (pour ceux qui ont quelque chose à échanger, biens ou monnaie…). Ainsi, le taux de résolution de dette est proche de 100% dans l’échange en utilisant le troc ou la monnaie. Au contraire le taux de satisfaction des besoins réels identifiés est plus faible dans le don (même s’il concerne également ceux qui n’ont rien à donner en échange).
 
Mais le don permet une meilleure répartition des richesses car on donne là où un besoin est identifié plutôt que là où il y a une contrepartie possible. Il permet sans doute également une meilleure régulation de la production de richesse. Cela est dû au fait que l’échange sépare la création de richesse (plus-value globale) de la répartition des richesses (recherche par chacun d’une plus-value particulière), alors que dans le don, la création de valeur se fait grâce à la différence de valeur d’usage pour celui qui donne et celui qui reçoit. Cependant les deux mécanismes de création de valeur sont probablement complémentaires, nécessitant de développer à la fois de l’échange et du don.

5 La donnaie, trois mécanismes pour faciliter le don

La monnaie utilise un mécanisme pour faciliter l’échange (un système de résolution de dette qui permet de décaler dans le temps les moments où on donne et où on reçoit). La donnaie pour sa part, nécessite trois mécanismes pour favoriser le don :
  • Maximiser la création de valeur par la différence entre la valeur d’usage pour le donneur et le bénéficiaire. Cela peut se faire en rendant visible aux bénéficiaires les dons possibles ou aux donneurs les besoins. Ce système pourrait devenir plus efficace si nous savons distinguer les besoins des désirs ;
  • Inciter à donner en faisant pencher la balance vers certaines de nos tendances naturelles : rendre vraies nos « prophéties autoréalisatrices », faire comme les autres (mimétisme), donner plus facilement aux autres qu’à soi-même ou encore sécréter de l’ocytocine lors de rencontres et lors de contacts physiques (tout en conservant la réciprocité dans ces tendances) ;
  • Développer les motivations intrinsèques :
    • l’estime de soi en développant des valeurs personnelles et collectives compatibles avec le don ;
    • la réalisation de soi en favorisant le plaisir personnel à s’immerger dans le don à l’autre (état de flow). Mais pour cette dernière motivation, très puissante, il faut dépasser la « barrière de l’effort » en favorisant une, deux ou plusieurs expériences personnelles ;

6 Quels indicateurs pour les donnaies ?

La monnaie nécessite un indicateur de la valeur d’échange. Pour la donnaie, nous devons avoir des indicateurs différents pour des valeurs très différentes celle des dons et celle des personnes. Plusieurs indicateurs peuvent être combinés pour faciliter le don :
 
Deux indicateurs sur les biens et services :
  • Un indicateur de besoin. Il devra éviter si possible de passer par la demande pour mieux distinguer besoins et désirs et ne pas se focaliser sur la personne mais sur ce dont elle a besoin ;
  • Un indicateur global de dons approximatif et anonyme pour donner l’avantage à l’empathie plutôt que l’analytique. Il peut évaluer le nombre de dons, mais également y ajouter (de façon distincte) le nombre de donateurs (de façon anonyme ou nominative mais non reliée aux dons) et les « gratitudes » qui montrent l’importance des dons pour ceux qui en bénéficient ;
Deux indicateurs sur les personnes : 
  • Un indicateur pour le donneur qui doit rester privé et peut évaluer de façon précise ou approximative : le nombre de dons, l’importance de ce que l’on a fait pour les autres ou pour le groupe, ainsi que le nombre et l’amplitude des états de flow qui nous apporté du plaisir à donner ;
  • Eventuellement un indicateur d’alliance qui doit rester approximatif pour ne pas fermer le groupe et changer souvent pour donner un cran d’avance à ceux qui donnent. Il doit se concentrer sur ceux qui ont de l’empathie et coopèrent plutôt que sur les profiteurs ;

7 Pour un retour vers le futur

Croire qu’il n’y a qu’une seule solution pour permettre aux hommes de mieux vivre ensemble, porte en lui les germes du totalitarisme. Ce livre se propose de revenir en arrière non pas pour remplacer l’échange par le don mais plutôt pour rouvrir les possibles. Il s’agit d’une première ébauche et il y a de la place pour développer de larges améliorations, inventer le « design de donnaies », articuler le don avec les autres modes de régulation humains et tester des solutions innovantes.
 

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