Après quinze jours d’interruption dus à une mauvaise grippe, voici la suite du feuilleton “l’animation nouvelles approches”. Nous arrivons presque à la fin de la première partie du kit de “survie de l’animateur de communauté” qui doit nous permettre de comprendre comment organiser un groupe pour animer des personnes qui n’ont pas de temps avec des animateurs qui n’ont pas de temps…


Aujourd’hui, il s’agit de la deuxième partie sur l’espace de partage qui doit nous permettre de retrouver facilement toutes les informations, quelque soit l’activité où elles ont eu lieu (diffusion d’information, rencontres, discussion entre les rencontres) et le moment où elles ont été échangées (hier, il y a une semaine ou il y a un an).



Comment partager pour toucher le plus grand nombre ?


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Nous pourrions partager les informations sur un grand tableau dans un lieu accessible aux membres de la communauté, mais cela nécessite de passer par là. Cela peut fonctionner pour une communauté fortement lié à un lieu (comme par exemple un tiers lieu, un lieu qui n’est ni la maison ni l’entreprise mais rassemble différentes personnes autour de projets comme les espaces de coworking ou les fablabs). Mais depuis, l’internet s’est largement développé et on peut considérer que presque chacun peut y accéder. L’espace de partage se retrouvera donc tout naturellement sur le net.


Il existe cependant plusieurs types de site. Le blog est mal adapté pour cette tache (il sert plutôt, comme nous l’avons vu à faciliter la diffusion d’information avec un public le plus large possible). Il est possible d’utiliser un wiki (un site où chacun peut facilement contribuer) comme par exemple , un pad (une page dans laquelle chacun peut écrire) tels que Etherpad ou Framapad ou encore un traitement de texte en ligne comme Googledoc ou encore Zoho. Il peut être intéressant de mixer ces outils suivant le niveau de complexité souhaité pour chaque service, en y ajoutant une page d’accueil pointant vers les différents espaces.

La gare de triage des services du groupe


Ici nous sommes au royaume des “outils pull” c’est à dire des espaces en ligne où il faut que l’utilisateur vienne chercher l’information. Contrairement aux mail et autres outils push où l’information est directement délivrée dans la boite au lettre de l’utilisateur, le site web nécessite une démarche de la part de l’utilisateur pour aller chercher l’information. Mais il complète parfaitement les autres activités de la communauté (diffusion d’information, rencontres, discussions entre les rencontres) en permettant de retrouver facilement n’importe quelle information, indépendamment du moment où elle a été proposée.


Que doit-on trouver dans l’espace de partage de la communauté ? A peu près tout, y compris les archives de ce qui a été échangé au cours des différentes activités :

  • Les informations de base de la communauté : la présentation du groupe, éventuellement la liste et la présentation des membres, si nécessaire les partenaires de la communauté  ;

  • La diffusion d’information : les informations du groupe diffusées via un blog, une page facebook, etc. ;

  • Les rencontres : un calendrier des prochaines rencontres et un lien vers les comptes rendus (ou mieux les rapports d’étonnement) des précédentes rencontres ;

  • La discussions entre les rencontres : les archives des discussions et une page pour s’inscrire et se désinscrire à la discussion (ou à l’ensemble des services si on a pu unifier l’inscription)  ;

  • Le suivi des projets ouverts collectifs : une ou plusieurs pages de travail par projet pour partager les informations en cours ;

  • Les ressources publiques proposées par la communauté : des guides et autres documents produits par la communauté ou certains de ses projets, des éléments de veille utiles dans le contexte du groupe ou même des ressources utiles produites par d’autres communautés ;


Ces différentes pages peuvent faire appel à des services en ligne variés, mais heureusement il est assez facile d’intégrer des pages web proposées par des sites différents soit en faisant des liens vers ces différentes pages depuis une page d’accueil qui nous offre ainsi une véritable gare de triage, soit mieux en intégrant directement certains services dans des pages du site afin d’unifier la présentation (on utilise pour cela des techniques appelées “widgets” ou “iframes…”).


Pour en savoir plus : intégrer des services au sein d’un même site

Nous avons choisi après plusieurs essais d’intégrer les différents services dans un site le plus simple possible. Nous avons intégré chaque page dans un wiki dédié au groupe, mais il est tout à fait possible d’utiliser votre propre site en intégrant les différents services utiles à la communauté dans un ensemble de pages. On retrouve cette organisation dans la plupart des communautés du site http://coop-group.org/ (voir par exemple http://coop-group.org/interlangues/ ). L’approche proposée tient compte des différentes remarques faites dans ce chapitre sur l’espace de partage mais également dans les chapitres sur les autres activités de la communauté.


Les sites sont structurés autour de 5 pages. Elles sont toutes accessibles depuis un menu


1. la page d’accueil

Elle permet d’accéder directement au maximum d’informations. Elle comprend deux colonnes. La colonne principale avec :

  1. une description du groupe groupe (un paragraphe) et ses partenaires ;

  2. le calendrier des rencontres (avec un bouton pour ajouter facilement une nouvelle rencontre et un lien vers les anciennes rencontres) ;

  3. une partie sur les “actions en cours” qui propose un lien vers une page pour chaque projet de la communauté (avec un bouton pour ajouter ou modifier un projet) ;

  4. une partie proposant des “ressources”, présentées sous la forme la plus compacte possible (liste et sous listes avec si nécessaires plusieurs liens par ligne pour que l’ensemble tienne sur une dizaine ou vingtaine de lignes tout en restant facile à chercher). On y retrouve également un bouton pour ajouter ou modifier des ressources

Une deuxième colonne permet d’afficher le flux d’information (généralement une page facebook intégrée grâce à un code au sein même de la page d’accueil)


2. La page “rencontres”

On y retrouve les prochaines dates de rencontres et un lien vers les anciennes rencontres comme dans la page d’accueil, mais si nous avons choisi d’ajouter cette page, c’est pour y placer un espace de rencontres permanent où les membres peuvent se retrouver soit en s’y donnant rendez-vous, soit simplement en y passant pour voir qui s’y trouve.


Cette page pointe actuellement vers un simple chat (échanges synchrones sous forme de texte), mais elle prendra toute son ampleur lorsque la nouvelle norme WebRTC sera largement diffusée sur le web. Il sera alors possible de se retrouver dans un “salon permanent” pour échanger par texte, audio mais également vidéo.


3. La page “discussions en ligne”

Cette page pointe vers les archives de la discussion en ligne (généralement les archives de la liste de discussion mail)


4. La page “inscription/desinscription

Cette page permet de s’inscrire sur l’outil de discussion en ligne, mais aussi de se desinscrire, de demander l’envoi d’un mot de passe oublié, etc. Dans l’idéal elle permettrait de s’inscrire en une seule fois à plusieurs des services en ligne utilisés par le groupe et de remplir un profil. Mais cela nécessite d’avoir une inscription unifiée à des services venant de différents fournisseurs (on parle de SSO - “Single Sign On”), de redévelopper tous les services de façon unifiée (voir plus loin “comment tuer votre groupe”) ou bien d’imposer de s’inscrire plusieurs fois. Nous avons donc fait le choix, à défaut de mieux, de n’imposer l’inscription que sur l’outil de discussion en ligne et de configurer tous les autres services afin qu’ils ne nécessitent aucune inscription.


5 La page administration (accessible dans coop-group depuis l'icône “roue dentée” à droite du menu)

Cette page est moins visible que les autres tout en restant accessible à tous (pour éviter la gestion des mots de passe multiples). Elle permet d’accéder à différents services sur le site et tout particulièrement, pour le facilitateur, au tableau de suivi des projets ainsi qu’à la page de description du groupe qui permet, comme nous le verrons au chapitre suivant sur l’écosystème de groupes, de constituer une base de donnée avec les informations de chaque communauté.



superbe site ou simple page de notes ?


La première chose à laquelle on pense est de développer ou de faire développer un site le plus beau et le plus cohérent possible. Il est effectivement plus facile d’avoir un site beau et cohérent que d’avoir une communauté active et productive. C’est une erreur commune qui consiste à donner la priorité à la technique plutôt qu’à la dynamique humaine. Mais ici, nous souhaitons que les porteurs de projets mettent à jour eux-mêmes leurs pages, que l’organisateur d’une rencontre puisse l’ajouter lui-même dans le calendrier, etc. Comme nous l’avons vu, les différentes personnes actives dans le groupe n’ont pas forcément une vision d’ensemble et une implication complète dans la communauté. Nous ne pouvons pas leur demander de se rappeler les outils spécifiques au groupe ni même de se rappeler leur mot de passe !


Nous avons fait le choix d‘avoir trois niveaux de pages, suivant qu’elles doivent être simples à comprendre et belles pour le lecteur ou très faciles à mettre à jour pour les utilisateurs actifs.

  1. les pages qui n’ont pas à être modifiées, elles intègrent souvent automatiquement des services ou des informations. Ces pages peuvent être complexes, mais développées une fois pour toute ;

  2. les espaces listant les projets en cours, les ressources ou encore les prochaines dates. Dans ce cas, le choix d’une page wiki simple à utiliser mais facilement intégrable au sein de la page d’accueil a été fait. L’utilisateur doit juste mettre à jour la page avec une syntaxe simple ou bien remplir un formulaire (pour le calendrier) ;

  3. les pages de travail qui doivent être mises à jour souvent (par exemple pour les projets). Dans ce cas, nous avons fait le choix d’un traitement de texte en ligne. La page a un aspect qui est moins intégré avec le reste du site mais la mise à jour est on ne peut plus simple : il suffit d’ajouter du texte et de mettre en forme dans un traitement de texte en ligne. N’importe quelle personne, même peu familière avec l’informatique ou encore ayant oublié les spécificités des outils de cette communauté par rapport à toutes celles auxquelles il appartient, peut facilement mettre à jour une page de travail ;


Exemple : comment tuer votre groupeà coup sûr…

Une façon absolument infaillible de tuer son groupe est de se focaliser sur le développement d’un site monolithique en espérant ensuite que les futurs membres se précipiteront pour s’approprier cet outil supplémentaire en plus de tous ceux qu’ils doivent déjà maîtriser…


Par charité, je ne citerait pas les nombreux cas que j’ai rencontrés, où des communautés même déjà existantes et actives ont été tuées en remplaçant l’animation par le développement d’un outil (en général un nouveau réseau social là où les utilisateurs de l’internet sont déjà saturés d’outils). Lorsqu’il y a un financement possible, il est tellement plus habituel de financer un développement web plutôt qu’une animation de communauté. La mise en place d’un financement pour aider au développement d’une communauté qui vient de naître est un des moyen les plus fréquents pour la tuer !


A vous de choisir : voulez vous un bel outil satisfaisant pour l’esprit avec personne dessus, ou bien une communauté active bien que chacun manque de temps pour l’animer ou y participer. C’est une question de priorité et cela nécessite des concessions : il faudra peut être intégrer des services qu’utilisent déjà le maximum d’utilisateurs (mail, page facebook) quitte à avoir un ensemble un peu moins cohérent.  


J’ai perdu tant de communautés qui ont été remplacées par des jolis outils que je suis devenu méfiant du financement des communautés par ceux qui ne comprennent par leur dynamique !


L’attrapeur : le gardien des trésors communs


Le groupe se réunit (ensemble et par petit groupe projet) et échange en continu, mais on ne peut être sûr qu’il conserve les trésors qui sont échangés ou produits lors de ses activités. C’est le rôle de “l’attrapeur” de prendre toutes les informations que l’on pourrait souhaiter retrouver, pour les classer et les mettre à disposition sur le lieu de partage accessible à tous de façon à y accéder facilement. Il transforme donc les flux d’information dans le temps en informations stockées par thématique, que les informations soient issues des réunions ou des échanges en continu. Le fait de présenter de façon synthétique des informations de ce qui se dit permet même de créer des débats complexes en intelligence collective avec des grands groupes.


Beaucoup de groupes vivent bien sans attrapeurs, chacun pouvant mettre à jour le site, mais pour ceux qui ont une ou plusieurs personnes qui acceptent ce rôle, le nombre de trésors qui s’envolent est bien plus réduit !


Attraper les informations utiles qui circulent dans le groupe peut prendre jusqu’à 5 heures par semaines sans outils. L’utilisation d’un outil comme Assembl permet de réduire ce temps à une heure ou deux. De plus le rôle d’attrapeur peut se mutualiser facilement et il est possible d’avoir un groupe de volontaires qui se répartissent le travail pour n’attraper qu’une semaine de temps en temps… grâce au travail de suivi du facilitateur qui s’assure qu’il y a toujours un attrapeur...

 


 

Retrouvez tous les épisodes publiés ainsi que d'autres contenus sur http://tinyurl.com/animapproches et échangez sur https://lite6.framapad.org/p/animapproches

(Des exercices, des exemples et des compléments sont ajoutés au fur et à mesure)

Rendez-vous le 26 février pour le prochain épisode: l’écosystème de groupes : et plus si affinités...

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