4.3 Définir les règles du jeu
Livre "la coopération, nouvelles approches" version 1.0
Cinq domaines à gérer
En plus de posséder un bon projet de départ, il va vous falloir définir les règles du jeu qui vous permettront de coordonner le projet pendant la phase ouverte à tous. Nous avons déjà rencontré ces règles, nous les avons déjà décrites comme base pour permettre de respecter les lois de la coopération.
Nous allons maintenant les reclasser suivant les 5 grands domaines que vous aurez à gérer dans votre projet :
- L'environnement
- La communauté des utilisateurs-contributeurs
- La redéfinition continuelle du projet
- La gestion des tâches et l'intégration des résultats
- Les mécanismes de contrepartie
Savoir adapter son projet avec astuce et imagination pour qu'il se conforme aux lois de la coopération est un art dans lequel certains coordinateurs font preuve de génie. L'artiste après avoir appris à maîtriser les techniques du pinceau ou du piano, saura ou non faire preuve d'inspiration. De même, les règles et méthodes proposées ne sont que l'instrument qui doit permettre au coordinateur de rassembler et de créer les conditions pour qu'émerge de grandes choses. L'oeuvre du coordinateur n'est pas directement le projet lui-même, mais la mise en place de l'environnement qui favorise le développement du projet.
Un environnement favorable
Le maître mot pour l'environnement est "l'abondance". Plutôt que de constater simplement si l'élément de base dont vous avez besoin pour votre projet est abondant ou non, nous avons vu qu'il était possible de choisir un autre point de départ qui sera naturellement plus abondant (apprendre à pêcher plutôt que de donner du poisson).
Savoir trouver l'abondance là où on ne l'attend pas fait parti de l'art du porteur de projet coopératif. Si ce texte peut donner quelques conseils, l'intuition du coordinateur reste irremplaçable. Un véritable génie de la coopération pourra même dénicher l'abondance là où toute autre personne ne verra que de la pénurie !
L'abondance doit être recherchée le plus possible et pas simplement dans les briques de base du projet. Le temps disponible doit aussi être abondant pour avoir le maximum d'opportunités. La sécurité matérielle du coordinateur et des contributeurs sont également la base qui leur permet de se concentrer sur le développement du projet.
Les trois règles pour un environnement favorable |
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Une communauté qui attire les contributeurs
Pour que de nombreuses personnes aient envie de s'intégrer à votre communauté, vous allez devoir renoncer à vouloir les en rendre captifs. Moins les membres potentiels se sentiront obligés de rester dans votre projet ou d'y contribuer plus ils pourront venir "pour voir" et rester s'ils se sentent bien. Vous avez plus de chance de voir vos membres coopérer s'ils restent dans votre communauté par envie que s'ils se sentent contraints !
Une communauté est basée à la fois sur un sentiment de confiance et un sentiment d'appartenance. L'outil le plus efficace pour cela est le temps. Il vous faudra ainsi : préserver le passé, construire un présent ou chacun peut se voir et montrer un futur à votre groupe.
La communauté devra non seulement favoriser les échanges entre les membres (tout en centralisant l'intégration du travail de chacun par le seul coordinateur pour garder la cohérence du projet), mais aussi avec l'extérieur pour enrichir les débats et apporter des opportunités de l'extérieur pour ce que l'on ne trouve pas à l'intérieur de la communauté.
Enfin, nous avons vu les dangers des mécanismes mimétiques collectifs [GIR]. S'il est bon d'avoir des "rites" et des références communes pour développer le sens d'appartenir à la même communauté, il peut s'y développer des tensions. Plutôt que de concentrer ces tensions sur un "bouc émissaire", cherchez d'autres mécanismes d'évacuation à mettre en oeuvre le plus tôt possible.
Finalement, animer une communauté est un art proche de la musique. Le coordinateur doit composer la progression du groupe comme une mélodie avec ses rythmes et en tenant compte des harmonies...
Les sept règles d'une communauté ouverte et équilibrée |
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Redéfinir continuellement le projet
Nous avons vu que dans l'environnement changeant dans lequel nous vivons aujourd'hui, une simple planification n'était plus possible. Pour cela il va vous falloir éviter plusieurs pièges :
Chaque fois que vous proposez une réorientation, vous ne devez pas être prisonnier de vos engagements passés. Pour cela, vous devez être vigilant de ne pas annoncer des résultats attendus à l'avance, mais plutôt des objectifs. Vous devrez cependant vous concentrer pour obtenir des résultats "en interne". Mais annoncez vos résultats qu'une fois obtenus.
Le deuxième grand principe est de garder les choses simples. Attendez avant de proposer de nouvelles orientations à vos membres qu'elles soient matures dans votre tête et que vous puissiez les présenter comme une évolution logique de ce qui a déjà été accompli.
Enfin, soyez vigilant de ne pas vous rajouter des contraintes supplémentaires. Cela est particulièrement vrai pour les contraintes financières. Chaque évolution ne doit pas rendre le projet dépendant d'un nouveau financement que vous n'auriez pas encore acquis.
Les quatre règles pour redéfinir continuellement son projet sans y ajouter des contraintes |
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Gérer les tâches et intégrer les résultats
Dans les projets coopératifs, le coordinateur conserve toutes les taches critiques. Celles-ci, si elles ne sont pas ou mal réalisées, peuvent mettre le projet en péril. Il est donc nécessaire que le coordinateur fasse preuve d'un grand art pour redécomposer son projet en un minimum de tâches critiques qu'il pourra supporter et un maximum de tâches non critiques parallèles proposés à la communauté ou récupérées ailleurs.
Une des lois de base est de rendre votre projet résistant à la non-coopération (il faut souvent un certain temps avant de susciter de nombreuses contributions). Si pratiquement personne ne contribue, votre projet doit pouvoir survivre. Toute contribution supplémentaire ajoutée à ce seuil minimum doit ensuite apporter un plus au projet. Plus le seuil nécessaire à la survie du projet sera bas et plus celui-ci sera également résistant aux agressions qui pourraient le pénaliser.
Les cinq règles de la gestion des tâches en projet coopératif |
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Des contreparties pour les contributeurs efficaces
Même si vos contributeurs s'impliquent sans rémunération directe dans votre projet, ils ont besoin de "carburant" pour s'investir. Nous avons vu que les contreparties principales qui peuvent motiver les meilleurs contributeurs sont : l'estime acquise auprès du groupe et à l'extérieur, le plaisir obtenu dans les échanges et le savoir-faire obtenu. Le plaisir du travail bien fait est également un moteur efficace, même si l'évaluation est cette fois individuelle et personnelle.
Les règles proposées pour éviter toutes les déviations du besoin de reconnaissance nécessitent d'abandonner le pouvoir coercitif et les nominations a priori à des postes opérationnels (comme dans le cas du principe de Peters [PET]).
Favoriser les mécanismes de contreparties demande beaucoup de doigté pour conserver un équilibre qui favorise l'estime obtenue par le groupe sans tomber dans les déviations de la recherche forcenée de la satisfaction individuelle du besoin de reconnaissance.
Les six règles de la contrepartie |
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Le coordinateur a un rôle crucial, non pour réaliser lui-même le projet mais pour mettre en place les conditions qui favorisent le développement cohérent du projet. Coordonner un projet est un art. Il faut à la fois maîtriser les règles qui facilitent la coopération et disposer de l'inspiration nécessaire pour adapter continuellement son projet dans 5 grands domaines :
Dans tous cas il devra chercher à se rapprocher des fondements de la coopération :
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Par J-M Cornu | Avant | 24/12/2004 11:30 | Après | Coopération | aucun commentaire | Lu 6929 fois |